« Au final, elles t’ont servies à quoi tes études ? »

Mon père, qui aime mettre les pieds dans le plat

Soppong. A peine un paragraphe dans les livres de voyages. Et pourtant. LA destination à ne pas manquer.

Cet endroit mériterait toutes les plus belles ovations. C’est décidé, c’est mon spot de Thailande favori. De tout ce que j’ai pu voir et vivre jusque là, mon coup de cœur est ici.

A partir du moment où l’on à prit les taxi scooter après le songthaew pour arriver ici, on s’est dit avec Ninon, d’un souffle commun :

« putain, c’est ici. Le début de notre paradis, le début de nos aventures, de vraies aventures ».

La suite nous prouvera effectivement que nous allons vivre des moments d’une intensité rare.

Rien que notre résidence est exceptionnelle. En plein milieu de la jungle, litteralement surélevée dans les arbres, la rivière en aval… Non seulement la structure et l’emplacement sont beaux, mais surtout l’anglais est parlé courament par tous (gérants comme résidents). Et encore mieux : tout le monde ici est un ou une aventurière. Et ça. C’est grandiose. Mon amour des gens s’est définitivement accru en cet instant. J’ai retrouvé mon auberge espagnole. Mes moments erasmus. La vie comme j’ai toujours préféré la vivre. Des personnes captivantes dans des environnements uniques que l’on va découvrir ensemble. Je pense à peu de chose près, que ce serait ça ma définition du bonheur.

Ni une ni deux, nous fomentons l’idée d’une expédition pour le lendemain avec 5 autres aventuriers avec lesquels nous avons sympatisés le soir même (Markus, Jacob, Jack, Lena et Mike) et réservons notre guide.

Cette journée…

Vous vous rappelez le jour de Noël quand vous aviez 5 ans et que vous étiez l’être le plus heureux du monde avec des espoirs et des paillettes pleins les yeux ? J’ai du ressentir cette émotion dans le plus pur de ses états environ toutes les 10 minutes max).

On commence par une balade, une grande descente pentue d’une bonne heure de marche dans la jungle.

Puis vient le moment tant attendu. Mon absolution. Mon enthousiasme est à son paroxysme. J’installe ma frontale. Remet une mèche de cheveux derrière mon casque. Installe mon téléphone dans un sac étanche. Reserre mes lacets. Enlève mon tee-shirt laissant place à mon maillot de bain. Et c’est parti pour visiter les entrailles de la terre.

Stalactites, stalagmites, colonnes, cascades, dépôts de calcite ressemblant à des rizières à étages, drapés tels des rideaux rocheux ou dans chaque strie de trouve une toute petite chauve souris. On retrouve aussi des serpents. Des poissons. Des blattes. Des araignées. Des crevettes. Des champignons insolites. Des criquets. Des grenouilles. (Et aussi des grosses chauves souris ^^).

On avance comme ça dans cette rivière souterraine sur plusieurs km. Sur l’argile humide. Sur les galets. Escaladant les roches avec précautions tellement la surface est lisses et les bords affûtées par des millions d’années de polissage par le passage de l’eau. Les chaussures de marche sont essentielles pour ne pas glisser (malgré le fait qu’elles soient totalement immergées, vu qu’à certains moment, nous avions de l’eau jusqu’aux oreilles).

Immergés. C’est le mot qui decrit le mieux ces instants. Impossible de ne pas vivre le moment présent car il est litteralement suspendu. J’aurai été bien incapable de donner une durée à cette escapade souterraine sur l’instant, tellement nous étions figés dans le temps.

Impossible également de rester insensible face à la grandeur de la nature qui nous entoure. On est vivants, on le sent car nous sommes aptes à regarder et analyser ces tabeaux immobiles. On est émerveillés par tant de beautés naturelles. Ébahis de découvrir les formes de vies aveugles qui se terrent dans cette obscurité. Fiers d’être capable de fureter et d’avancer dans cet endroit hostile. Solidaires, à se serrer les coudes et s’entraider pour avancer.

Tout chez moi résonne.

Ma passion pour la biologie et la géologie. La fierté de connaître et la satisfaction de comprendre comment tout cela fonctionne. Ma passion pour les relations humaine fortes et improbables. Ma passion pour l’esthétisme et les formes ubuesques. Ma passion de vivre des aventures inédites, mêlant surpassement personnel et émerveillement en communauté.

Ce cumul. Cette formule magique précise. Font qu’en cet instant, je ne peux réprimer un bonheur certain. Une joie débordante. Une envie de vivre exaltante. Tout en moi sent cette explosion, cette force, ce pouvoir immense, de me sentir dans une strate émotionnelle proche de la transe.

Alors que pourtant, comme le diraient les factuels, les réalistes, je me traîne dans la boue et dans l’eau froide, me faisant moult bleus et écorchures, risquant inutilement de me blesser et qui plus est en présence de bêtes qu’on appelle en général des nuisibles. Tout ça pour voir des cailloux.

Mais putain quels cailloux. Je voyage littéralement dans un cailloux géant, une roche mère de calcaire altérée par les ruissellements de l’eau. Dont on entend les plocs discrets derrière le bruissement de la rivière.

Donc à mon cher père, je peux répondre maintenant à cette question ingénue « d’a qui m’ont servies mes études au final » : à cultiver ma passion pour accéder à ces moments de bonheurs parfaits.

Avoir la chance de comprendre comment ce monde, cet environnement se forme, pouvoir le transmettre à mes comparses de route, expliquer la chimie, la formation de la calcite, l’altération de la roche mère, l’adaptation des être vivants à ce milieu, les formes et les couleurs, et même jusqu’à la reproduction des gendarmes sur le chemin du retour (les insectes hein, pas ceux en uniformes), c’est clairement à ça que m’ont servies mes études. Comprendre le monde qui m’entoure, en savourer l’existence, en aimer ses merveilles et transmettre ces connaissance et cet amour à mon prochain. (Rappelez vous ce que disait Maike, ma prof de plongée, on protège ce que l’on aime). Et peut être pouvoir à mon tour, leur permettre de vivre par la suite pareille émotion de plénitude sur cette terre. Ce qui aura fatalement pour conséquence de vouloir à leur tour mieux la protéger. Ou peut être transmettre de nouveau ces connaissances et créer une chaîne vertueuse.

Hum… je note aussi qu’en cas d’extrême bonheur ressenti, mes croyances en l’existence d’un monde beau et bienveillant s’accroît drastiquement. Gardons cet optimisme voulez-vous ?


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